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Mémoire des Hommes de Sainte Livrade sur Lot
26 février 2014

PAGE 99: DÉCOUVERTE DE SARCOPHAGES A CALVIAC, LA VENTE DES BIENS DE L'ÉGLISE ET DES IMMIGRÉS,LE CONTE AGENAIS ET "PAYSANS"...

    BIENTÔT PUBLICATION DES DESCRIPTIONS ET ADJUDICATIONS DES BIENS

NATIONAUX APPARTENANT AUX CI-DEVANT RELIGIEUX ET NOBLES

IMMIGRES LORS DE LA RÉVOLUTION!

ROSE CONTRAT ETABLISSEMENT CHAPELLE 18 AOUT 1639

Contrat d'établissement de la chapelle de Notre dame de La Rose.

Cette Mission et congrégation n'eut une vie éphémère:  154 ans, de la date de sa construction, 18 Août 1639, comme l'indique ce document assez rare, à la Révolution, où elle fut vendue et dépecée le 7 avril 1793, comme le montrerai prochainement lors de la publications des documents, dont la photo du parchemin de l'adjudication des biens de la Rose. Pourtant, comme pour le Couvent des Ursulines, qui vécu sensiblement la même époque et la même aventure,  la courte vie de ces congrégations religieuses livradaises ont laissé bien des vides et des questions que leur grand frère aîné, le Prieuré, dont nous sommes plus documentés, ne pose avec moins d'insistance... (Photo: Patrick Garcia)

Je vais publier très prochainement, d’ici un mois,  la listes « Des biens appartenant à Messieurs les Ci-devant Religieux » mais aussi ceux des immigrés qui ont été confisqués et vendus.

     Voila, il m’a fallut 40 ans pour mettre à jour ce trésor. J’ai eu un  accident à 19 ans, et mes jours d’immobilisation, je les passais aux archives d’Agen, recopiant des centaines de pages manuscrites que je mets sous informatique. Désormais à la retraite pour vous en faire profiter, car nous autres, historiens amateurs, avons une « MISSION », être les « PASSEURS » de notre modeste savoir…

     Le jour où je ne serai plus là, ces feuillets iront certainement à la poubelle, il faut en faire profiter ceux que cela intéresse ! Tant et tant de « PASSEURS » potentiels n’ont pas eu cette démarche, et sont restés des « GARDEURS » - moi je dirai des égoïstes - et leur savoir s’en est allé avec eux, perdu à jamais, car tout s’efface, comme nous… Internet est à ce sujet une bénédiction.

     Sur les écrits que je publie, j’ai tenu à conserver les tournures de phrases et de français de l’époque, même si parfois j’ai dû modifier légèrement pour rendre compréhensible ces parchemins dont les écritures sont souvent illisibles même si très belles… Le même nom, de la même personne ou du même lieu peut être orthographié différemment au fil des paragraphes, c’était comme ça…

  Le français moderne venait de se généraliser, surtout de manière phonétique, mais le matériel est là… Il vous permettra de vérifier sur place à qui appartenait, qui a acheté quoi et où, répercuté en mesure et monnaie moderne. De quoi meubler bien des curiosités. Vous verrez, par exemple, que lors de la vente des biens des religieux, on a vendu de tout, à tous les prix et à de très nombreux citoyens originaires du secteur.

   Vous, qui vous demandez peut être, comment est arrivé chez vous, ce tableau, ce meuble, ce prie dieu ou autre objet ancien, peut être qu’en consultant la liste que je publierai, vous retrouverez un de vos aïeux venu participer, lui aussi, à l’aubaine…

  

  Malgré mes imprécisions, mes doutes quant à telle ou telle signature, j’espère que ce travail vous conviendra, il va compléter les séries que j’ai mises en ligne sur la religion à STE LIVRADE. J’avais surtout parlé des origines et de la vie des religieux, des monuments et de leur emplacement. Je continue par la dispersion de leur mobilier et la vente de leurs biens, du moins, des édifices religieux. Avec les unités de surfaces, de longueurs, et monétaires, pas facile à préciser, car d’une ville à une autre, le pied variait de plusieurs centimètres, la livre aussi, le franc, n’en parlons pas, mais cette synthèse, malgré les fluctuations dues aux dévaluations monétaires, aux imperfections des rédacteurs, notaires ou adjudicateurs, sont assez réalistes.

  Et raffinement, j’ai publié pour chaque catégorie une carte très précise où je colorise les emplacements des possessions du Prieuré (en orange), du couvent des Ursulines (en bleu), de ceux de la congrégation de la Mission de la Rose (en vert) et des biens propres aux immigrés (en rouge). Une carte très édifiante où l’on voit les quartiers convoités par les nobles et les religieux, bien sûr …. Les bonnes terres….

   Vous avez le matériel, à vous de vous en servir au mieux….

 

Votre dévoué « PASSEUR »

PATRICK GARCIA

 

 oooooOOooooo

DECOUVERTE DE SARCOPHAGES A CALVIAC!

Préambule

Nous sommes tous amoureux de notre région et de notre histoire locale qui nous rassemble autour de blogs ou de sites comme celui-ci, consacré à la mémoire de notre région…

Dans ma longue carrière de collaborateur au grand quotidien régional « La Dépêche du Midi », j’ai eu à relater divers événements en rapport avec notre loisir ou notre passion. J’ai déjà eu l’occasion ici de mettre en ligne certains de ces articles, je continue avec celui-ci  qui permet de découvrir cette nécropole près de Monflanquin.

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L'équipe de bénévoles commence les travaux de sauvetage, notez l'encaissement du chantier! (Photo: Patrick Garcia)

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La face avant d'un sarcophage dégagé de sa gangue de pierres et débrits.  (Photo: Patrick Garcia)

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Vue de dessus, la dalle supérieure est fracturée par la pelle mécanique.  (Photo: Patrick Garcia)

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Première vue de l'intérieur de la sépulture.  (Photo: Patrick Garcia)

5 mai 2005

 

"DECOUVERTE D’UNE NECROPOLE ET DE SARCOPHAGE  PRES DE MONFLANQUIN"

 

« C’est un véritable coup de chance pour les amateurs d’histoire, un superbe sarcophage vient d’être découvert dans la commune de Calviac, blottie sur les coteaux à quelques kilomètres de Monflanquin. Une Américaine vient d’acheter l’ancien presbytère de l’église St-Martin de Calviac, du 12 ° siècle. De gros travaux d’aménagements sont en train d’être réalisés pour le compte de la propriétaire quand la pelle mécanique accroche une dalle qui vole en éclats. Un premier sarcophage est dégagé, il a tellement souffert qu'il sera difficilement récupérable. Les ouvriers préviennent alors Stéphane Mérigot le spécialiste local de la Société Archéologie et Histoire de la MJC. La présidente de la MJC, Mme Françoise Paul fait appel à des renforts villeneuvois sous la direction de MM JF Garnier, Pt du club Villeneuvois, Daynés, Pt de la société départementale, et Christophe Chabrier, archéologue confirmé, qui avec l’aide d’une douzaine de bénévoles, accompagnent le dégagement entamé par Stéphane Mérigot, jeudi de l’ascension. Une nécropole semble entourer le bâtiment, mais les travaux sont rendus difficiles par la qualité du sol: de grosses dalles de calcaires plusieurs fois remaniées par les divers travaux qui se sont succédé au fil des siècles. Enfin, le moment tant attendu arrive, après des heures de déblaiement, de nettoyage au pinceau, de tamisage des déblais, on peut regarder à l’intérieur du cercueil de pierre. Il est habité, mais la tombe semble déjà vandalisée. En effet, au niveau des mains, qui sont jointes, la terre a été remaniée, et l’objet métallique que détenait le défunt est perdu pour l’histoire... Le sarcophage qui semble dater du bas moyen-âge ne pourra être daté convenablement qu’après exhumation de son contenu qui sera minutieusement analysé. Car il s’agit peut- être de réemploi et il faut comparer les motifs de la dalle du couvercle avec des modèles déjà existants. Ce lieu a connu l’occupation romaine, il y avait un château fort à cet emplacement, l’église est ancienne, de tout cela il ne reste que quelques pans de murs et à présent, ce magnifique spécimen funéraire. Pour Stéphane Mérigot et les spécialistes qui l’entourent, il faut à présent attendre les ordres de M. Barreau, Dr des Antiquités à Bordeaux, qui autorisera, ou nom, la poursuite des travaux et peut- être, le sauvetage de ce précieux témoin d’un passé évanoui. »

 

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Vue générale du chantier en fin d'été, les peaux sont tannées et l'ensemble bien dégagé.  (Photo: Patrick Garcia)

 

9 Août 2005

 

 

 

"NECROPOLE DE CALVIAC : LES EXPLICATIONS"

 

 

 

« De superbes sarcophages ont été découverts dans la commune de Calviac, près de Monflanquin. Gros travaux d’aménagements à l’ancien presbytère de l’église St-Martin de Calviac, du 12 ° siècle, la pelle mécanique accrochait une dalle qui volait en éclats. Les ouvriers, sur ordre de l’architecte, M. David Rabot,  prévenaient alors Stéphane Mérigot le spécialiste local de la Société Archéologie qui est donc "l'inventeur" du site.  Christophe Chabrier, archéologue confirmé, avec l’aide d’une douzaine de bénévoles, accompagne le dégagement entamé par Stéphane Mérigot et prend en charge le chantier. Des mois et 15 week-ends plus tard, la nécropole qui entoure le bâtiment est bien dégagée. Les sarcophages sont là, et leur contenu est minutieusement vidé et inventorié par 2 archéologues envoyés par le SNRA de Bordeaux, MM Laurent Charles et Sacha Kacki. Des heures de déblaiement, de nettoyage au pinceau, de tamisage des déblais, en plein "cagnard"...  D'après Christophe Chabrier, les sarcophages datent du 6e siècle, il y en a 3, parfaitement conservé, vierge et magnifique... Les traces des ciseaux sont parfaitement visibles, presque une décoration... Les locataires ont une curieuse attitude, contrairement à l’habitude, les bras des défunts ne sont pas croisés sur la poitrine, mais relevés au niveau du visage, un peu comme quelqu'un qui lèverait les bras... Malgré les fouilles minutieuses, pas un objet métallique, pas une bague, une épingle pour suaire, pas une broche, rien... Décevant. Pour M. Chabrier " Ce qui est primordial, est que ces sépultures sont vierges et scellées. Cela démontre une volonté d’humilité, contrairement à d’autres moments de notre histoire." Les tombes n’ont pas été réemployées et sont donc dans leur état originel. Pour Stéphane Mérigot," la nécropole est beaucoup plus grande, des dizaines de sarcophages sont encore proches, mais ne seront pas visités, du moment qu’ils ne soient pas menacés". Ces 3 magnifiques spécimens seront remontés dans quelques semaines, à la fin des fouilles, ils iront meubler l’église de Calviac et de Monflanquin. Un juste retour quand on sait que le seigneur de Calviac a contribué à créer la bastide de Monflanquin. Pour M. Chabrier, à l’époque des sarcophages mérovingiens, succède un temps de sépultures en pleine terre au dixième siècle, et enfin un four à céramique, contemporain de la construction de l’église, au 12ème siècle. »

 

 PATRICK GARCIA

Calviac TRAJET

Emplacement de l'ancienne église de Calviac où ont été trouvés les sarcophages. (Plan: Patrick Garcia)

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millet les glaneuses

Une vie "idéalisée" du travail des paysans par Millet, pour ouvrir ce chapitre, comme toujours chargé de drames et de haines... (Repro: Patrick Garcia)

Condensé d’

 

« HISTOIRE DES PAYSANS D’EUGENE BONNEMERE »1856

 

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Episode 5

 

17ème siècle

 

 

 

LOUIS XIV

 

Minorité de Louis XIV. La France est au pillage. Les maltôtiers, les gouverneurs, les intendants. Ravages de l'armée. Les campagnes sous la Fronde.

 

 

 

 

 

Henri IV anéantit la puissance, alors sans contrôle, des gouverneurs de province, Richelieu abat ses pieds la féodalité à coups de hache, et Louis XIV l’avilie et l'annihile en réduisant les plus grands seigneurs au rang de la domesticité.

 

 

 

Louis XIII légua à Louis XIV, ou plutôt Richelieu légua à Mazarin de Grands embarras financiers. Les querelles des princes et des grands déchirèrent la France pendant la minorité du jeune roi, comme elles l'avaient fait sous celle du fils d’Henri IV, seulement, comme la main du ministre était moins ferme, les excès furent plus grands et plus prolongés.

 

     Les campagnes protestèrent par d'impuissantes révoltes. Sept ou huit mille paysans se soulevèrent dans le Rouergue (1643), s'emparèrent de Villefranche, sous la conduite d'un chirurgien de cette ville nommé Petit, l'abandonnèrent après l'avoir pillée, et lorsqu'ils y voulurent rentrer, ils furent défaits par les troupes royales et les gentilshommes de la province, revenus de leur première stupeur.

 

On pendit les chefs, et, profitant de la terreur inspirée par cette répression sévère, on augmenta les tailles de cinq à six millions !

 

      D'autres provinces nous présenteraient un spectacle semblable car partout, gouverneurs et intendants, tous grands voleurs, tyrannisaient et dépouillaient les pays livrés à leur avarice…

 

         Février 1652. Notons encore que quelques jours auparavant (2 janvier), le parlement de Paris avait ordonné des informations contre le désordre des troupes du maréchal d'Hocquincourt. Le jeune roi quitte Saumur et se rend à Blois le maréchal l'y accompagne avec son armée, « qui faisait des désordres  incroyables, faute de paiement. » (Retz, 2, 69.) Les troupes du prince de Condé lui-même se livraient sous ses yeux aux mêmes excès, portant le pillage, la ruine, la honte et la mort partout où elles passaient. L'histoire nous les montre d'abord dans le diocèse de Meaux,  où elles firent les ravages que la guerre même n'a jamais autorisés (Duplessis, 457). »

 

    On suit le héros à la trace sanglante qu'il laisse derrière lui sur la terre de France, et nous le retrouvons bientôt campé près de Béthisy, dans le Valois. « 0n voit encore sur les lieux des traces de son camp, dit dom Carlier. Les registres des églises et communautés sont semés de traits de barbarie qui font horreur. Les soldats ne s'en tenaient pas au pillage ils exerçaient avec une sorte de raffinement des cruautés qu'on se permet rarement dans les expéditions militaires, où l'animosité et la fureur portent aux plus grands excès. Après le passage de ces troupes, le pays était rempli d'objets plus hideux les uns que les autres. A peine parcourait-on quelque partie du chemin sans rencontrer des gens mutités, des membres épars, des femmes coupées par quartiers après avoir été violées, des hommes expirant sous des ruines, d'autres qui conservaient encore un reste de vie dans un corps déchiré ou ensanglanté, d'autres enfin percés de broches et de pieux aiguisés. J'ai vu, dans un écrit du temps, le trait d'un laboureur qui, ayant refusé à des soldats une somme d'argent qu'il n'avait pas, fut attaché parles pieds au plus fougueux de ses chevaux, qu'ils mirent en plaine en le chargeant de coups. Les membres du laboureur furent disloqués et mis en pièces on les retrouva épars, et les pieds encore attaches à la queue du cheval, à l'endroit ou cet animal s'arrêta. »

 

 

 

      Mais Condé, après tout, était un révolté et un l'auteur de guerre civile, et sans doute Turenne, qui marche contre lui, Turenne, ce héros si pur et si poétique, va nous montrer la contrepartie de ces scènes effroyables.

 

« Cette armée, dit D. Carlier, de laquelle le pays attendait sa délivrance, commit de grands ravages dans le canton. » Cette gloire militaire dont les hommes sont si fiers et dont l'humanité rougit; les voilà ces héros des batailles, les seuls, ô honte et ingratitude! Dont le peuple sache les noms et conserve la mémoire. Pour nous, historien des victimes des conquérants et de ceux que l'on appelle les défenseurs de la patrie, si grand que soit Condé, nous dirons de lui, avec Dulaure : « Ne déguisons rien, jugeons les hommes par leurs actions, et ne voyons dans un tel capitaine qu'un brigand de plus ».

 

   Un jour, à Seneff, le lendemain d'une de ses plus sanglantes victoires, Condé parcourait le champ de bataille, escorté de la foule dorée de ses lieutenants. C'était une belle et glorieuse journée, un noble et enivrant spectacle vingt-cinq mille créatures humaines jonchaient la plaine; aussi vit-on les deux partis faire chanter à l'envi des Te Deum d'actions de grâces, comme si les hommes espéraient entraîner Dieu de complicité dans toutes leurs sanglantes folies:

 

 « Baste s'écria le héros, une nuit de Paris réparera tout cela » C'est que Condé n'était, pas seulement un grand capitaine, mais un homme de beaucoup d'esprit.

 

Et cependant non. Monseigneur, une nuit de Paris ne réparait pas cela, car chacun de ces hommes de vingt-cinq ans que vous aviez fait tuer était un capital lentement, et péniblement accumulé, et qu'un poupon vagissant dans son berceau ne remplacerait pas car des champs ravagés, des habitations pillées, des établissements industriels détruits, des capitaux consommés, en ravissant les moyens de subsistances, font mourir encore bien du monde en dehors des champs de batailles, victimes indirectes de ces jeux sauvages et sanglants.

 

Callot, témoins des misères du temps

 

      Jetons les yeux, dans l'œuvre de Callot, sur la série de dessins qui porte le titre : « Les misères et malheurs de la guerre ».

 

    L'album se compose de dix-huit feuilles, qui, les deux premières et la dernière exceptées, constituent une macédoine de brigandages, de meurtres et de crimes de toutes sortes. Callot a voulu faire des soldats; son burin, malgré lui, a dessiné des bandits.

 

    Arrêtons nos regards sur une de ces feuilles, sur la cinquième.

Les_misères_et_les_malheurs_de_la_guerre_-_05_-_Le_pillage

Que dire de plus que la présentation (ci-dessous) de Bonnemère sur l'oeuvre de Callot reproduite ici? (Reproduction: Patrick Garcia)

Le merveilleux artiste a rassemblé dans quelques centimètres carrés toute la verve, toute la fougue d'inspiration qui eût suffi à remplir une toile historique. Tandis que git ça et là le tribut de la basse-cour et de l'écurie, que quelques-uns brisent et vident prestement armoires et buffets; un soldat égorge un homme renversé, pendant qu'un autre va frapper une femme qu'il retient par s cheveux, et qui fuit, entrainant un enfant par la main. Trois autres lèvent le fer sur un homme agenouillé, lorsqu'une femme âgée, sa mère, sans doute, se précipite, une bourse à la main. Au fond, d'autres boivent autour de tonneaux effondrés, et d'où le vin coule à flots. Deux autres braves luttent sur un lit contre une femme en désordre, et une porte ouverte à droite nous laisse deviner encore une profanation semblable.

 

Cinq autres soldats ont allumé un brasier dans la vaste cheminée ils maintiennent sur les charbons ardents les pieds d'un malheureux paysan, qui ne se laisse pas voler assez vite, et un autre, suspendu par les pieds au milieu d'un nuage de fumée, complète cette scène d'horreur.

 

 

 

 

 

La Féodalité au 17ème siècle.

 

Tyrannie des seigneurs.

 

 

 

           Les plus hauts dignitaires de l'Eglise donnaient au besoin l'exemple, témoin les archevêques de Reims et de Lyon, qui faisaient tout trembler sous eux, sans en excepter les intendants et l'autorité militaire (Tallemant, III, 183, 19A. Dangeau, III, 178).

 

          Qu'est-ce que les manants pouvaient attendre de ces nobles gentilshommes, lorsqu'on voit Bassompierre tenir le poignard sur la gorge d'un père, tandis que, sous les yeux de cet infortuné, un de ses amis viole sa fille ; Hocquincourt offrir d'assassiner Condé dans les rues de Paris, et la Rochefoucauld, le moraliste, tenter d'étouffer le coadjuteur entre deux portes!

 

             Un autre, M. de Vaubecourt, quand il tenait entre ses mains des prisonniers, les faisait égorger par son fils, enfant de dix ans, pour l'accoutumer de bonne heure au sang et au carnage.                    Un autre encore, des environs de Saumur, lorsqu'il était en grande colère contre un paysan, lui disait «Je ne veux pas te battre, je ne te battrais pas assez mais je te veux faire battre par mon fils! » (Id., II,33.) Aussi, quels hommes devenaient ces enfants! L'un d'eux, à trente ans, avait tué soixante-douze individus en duel. Un jour, dans son château, il poursuivait, pour la violer, la fille d'un de ses tenanciers elle se précipite par la fenêtre se tue. Mais trouvant le cadavre chaud encore, il consomme sur elle son crime épouvantable. (Tallemant, X, 13.) 

 

 

 

          En dépit des dénégations intéressées des admirateurs du bon vieux temps, l'infâme droit de markette (cuissage) était encore, au dire de Fléchier, assez commun en en Auvergne ; y a trois cents ans à peine. Lorsque la mariée était jeune et belle, le seigneur ne renonçait a l'exercice de son droit en nature que moyennant une redevance plus forte, que celle dont il se contentait d'habitude, « et il en coûtait bien souvent la moitié de la dot de la mariée. » (Id., 173.) La même coutume existait dans le Béarn. Un époux ne pouvait connaître sa femme avant de l'avoir offerte pour la première nuit au châtelain, qui en usait avec elle à sa discrétion. Le premier enfant né du mariage était libre de droit, parce qu'il pouvait arriver qu'il fut le résultat des plaisirs du seigneur !

 

 

Les_misères_et_les_malheurs_de_la_guerre_-_08_-_Vol_sur_les_grandes_routes

Toujours de la même veine, Callot raconte ici un épisode classique d'attaque sur les routes... Ses commentaires sont bien lisibles sous la gravure.(Reproduction: Patrick Garcia)

 

Colbert. Détresse des campagnes. Famine. Misère effroyable. Extorsions fiscales. La comédie des états.

 

 

 

       A peine arrivé au pouvoir, Colbert commença par Instituer une chambre de justice (1661) pour poursuivre les gens de finance. Mais comment faire pénétrer la lumière dans les profondeurs de ce chaos, comment se diriger dans les ténèbres des souterrains creusés par ces maltôtiers que le surintendant d'Effiat comparait à la seiche, qui sait l'art de troubler l'eau pour tromper les yeux du pécheur qui l'épie? L'argent du prince est sujet à la pince, disaient-ils, et à l'abri derrière cet aphorisme, pour verser trente-cinq millions dans les caisses de l'État, ils levaient quatre-vingt-dix millions de tailles sur le peuple.

 

    En 1664, il fit annuler les lettres de noblesse accordées depuis vingt ans, en énonçant que ces privilèges étaient accordés « au préjudice de plusieurs paroisses, incapables depuis lors de payer leur taille, à cause du grand nombre d'exempts qui recueillaient les principaux fruits de la terre, sans contribuer aux impositions dont ils durent porter la meilleure partie au soulagement des pauvres. » Les usurpateurs de titres nobiliaires furent poursuivis, et en Provence seulement, douze cent cinquante sept bourgeois perdirent ainsi leurs privilèges de noblesse usurpée…

 

   Ce premier pas fait, Colbert voulut frapper sur les maires, échevins et autres officiers municipaux, et sur toute cette portion vaniteuse de la bourgeoisie qui avait acheté de petites sinécures pour s'exempter de la taille. Mais cette fois, ceux qui profitaient de l'abus étaient si nombreux, ils s'agitèrent tant, que l'on dut se contenter d'un moyen terme…

 

    L'abus grandit donc, au lieu de disparaître, et Vauban constate qu'au commencement du siècle suivant, y avait des fermes (le quatre à cinq cents francs de revenus qui payaient cent francs ou plus, tandis que d'autres, de trois ou quatre mille francs, mais appartenant a quoique personnage influent, n'en payaient que trente ou quarante.

 

 

 

     Par malheur, les campagnes purent rarement profiter des bénéfices de ces sages ordonnances, et le bon vouloir du tout puissant ministre était, dans l'application, annihilé par mille impossibilités sans cesse renaissantes.

 

        Et cependant, comment se fait-il que sous Colbert la France ait eu si grand faim, maladie qui remarquons-le dès à présent, va passer désormais à l'état chronique, pour peser sur les campagnes jusqu'aux derniers jours de la monarchie?

 

 

 

         Colbert donna en toute occasion le pas à l'industrie sur l'agriculture, dont il comprima l'essor par des entraves de toutes sortes. Non content de prohiber l'exportation des grains à l'étranger, il en gêna encore, par d'absurdes restrictions, la circulation de province à province. Il voulut avant tout que le blé restât à bas prix pour favoriser ces manufactures, ces centres industriels et féconds qui, à sa voix, surgissaient sur tous les points du pays; il y réussit; seulement il arriva que les laboureurs, n'étant plus excités par l'espoir du gain et voyant le marché restreint, se découragèrent, ils commencèrent leur désastreuse et persévérante émigration vers les villes, si pleines de séductions, et qui les invitaient à délaisser l'atelier agricole, devenu plus que jamais une impasse, en leur offrant dans les cités des travaux moins pénibles et plus lucratifs.

 

            Le plat pays fut déserté, l'agriculture dépérit abandonnée, les campagnes demeurèrent incultes, et la stérilité et la disette furent le résultat de cette faute immense. La récolte de 1661 fut donc insuffisante, et le peuple, avec sa courte vue, son défaut de mémoire et son inintelligence habituelle, sensible aux dangers du jour, mais sans prévoyance pour les difficultés du lendemain, oublia tout d'un coup qu'il s'était, parfaitement trouvé, pendant nombre d'années, de la libre circulation de grains introduite par Sully, et il se prit à rejeter sur cette liberté les causes de la disette…

 

          Les effets ne se firent pas attendre, et bientôt une famine terrible fit mourir par milliers les paysans dans les campagnes abandonnées. Ils affluèrent dans les villes, encombrant les hôpitaux :

 

« Les pauvres hommes des champs semblent des carcasses déterrées, la pasture des loups est aujourd'hui la nourriture des chrestiens; quand ils tiennent des chevaux, des asnes et d'autres bestes mortes et étouffées, ils se repaissent de cette chair corrompue qui les fait plutôt mourir que vivre.  L'on a trouvé une femme morte de faim ayant son enfant à la mamelle, qui la tétoit encore après sa mort, et qui mourut aussi trois heures après. Un misérable homme à qui trois de ses enfants demandoient du pain les larmes aux yeux, les tua tous trois, et ensuite se tua lui-mesme. Un autre, à qui sa femme avoit pris un peu de pain qu'il se réservoit, luy donna six coups de hache, la tua à ses pieds, et s'enfuit…. »

 

 

 

    Enfin, la misère et la disette se rendent si universelles, qu'on assure que dans les lieux circonvoisins la « moitié des paysans est réduite à paistre l'herbe, et qu'il y a peu de chemins qui ne soient bordés de corps morts ».

 

 Il n'y a rien de plus véritable que dans le Blaisois, la Sologne, le Vendômois, le Perche, le pays Chartrain, le Maine, la Touraine, le Berry, partie de la Champagne et autres lieux où le blé et l'argent manquent, il y a plus de trente mille pauvres dans la dernière extrémité, et dont la plus grande part meurent de faim. »

 

    En soixante-trois familles de la paroisse de Chambon, on n'a pas trouvé un morceau de pain; il y avoit seulement dans une un peu de paste de son que l'on mit cuire sous la cendre; et dans une autre, des morceaux de chair d'un cheval mort depuis trois semaines dont la senteur estoit espouvantable. » Les pauvres sont sans lit, sans habits, sans linge, sans meubles, enfin dénués de tout; ils sont noirs comme des Mores, la plupart tout défigurés comme des squelettes, et les enfants sont enflés. Plusieurs femmes et enfants ont esté trouvés morts sur les chemins et dans les blés, la bouche pleine d'herbes. »

 

  M. de Saint-Denis, qui est seigneur d'une des grandes paroisses du Blaisois, assure que plus de huit vingt (160) de sa paroisse sont morts manque de nourriture, et qu'il en reste cinq à six cents dans le même danger. « Ils sont, dit-il, réduits à pasturer l'herbe et les racines de nos prés, tout ainsi que les bestes ils dévorent les charognes, et, si Dieu n'a pitié d'eux, ils se mangeront les uns les autres. Depuis bientôt cinq cents ans, il ne s'est pas vu une misère pareille à celle de ce pays. Il reste encore quatre mois à souffrir pour les pauvres gens. » M. le prieur, curé de Saint-Soleine de Blois, écrit que l'on a trouvé à Chiverny, dans un lit, le mari, la femme et quelques enfants morts de faim. La plupart de ces pauvres gens n'ayant pas la force de se lever, ne se nourrissent plus que d'orties bouillies dans de l'eau, puisqu'ils ont mangé toutes les racines et qu'il n'en reste plus de mangeables.

 

     MM. les curés de Villebaron, de Chailly et de Marolles attestent qu'ils ont deux ou trois cents familles qui, non seulement sont contraintes à manger de l'herbe, mais d'autres choses qui font horreur. »

 

« M. Rouillon, vicaire de Saint-Sauveur à Blois, atteste qu'il a vu des enfants manger des ordures; mais, ce qui est plus estrange, qu'il en a vu deux dans le cimetière sucer les os des trépassés, comme on les tirait d'une fosse pour y enterrer un corps. M. le curé écrit aussi qu'il a ouï dire la mesme chose à plusieurs de ses chapelains, témoins de ce spectacle inouï. » M. Blanchet, sieur de Bonneval, prévôt de la maréchaussée de Blois et de Vendôme, atteste que les chemins ne sont plus libres en ces quartiers-là; qu'il s'y fait quantité de vols de nuit et de jour, non par des vagabonds, mais par quelques habitants des paroisses, qui avouent hautement leurs larcins, et disent qu'ils aiment mieux mourir à la potence que de faim en leurs maisons. » Un curé du diocèse de Bourges escrit qu'en allant porter le saint viatique à un malade, il a trouvé cinq corps morts sur le chemin, et qu'on a trouvé dans le mesme canton une femme morte de faim, et son enfant âgé de sept ans auprès d'elle qui lui avait mangé une partie du bras. (Pour la misère effroyable, en 1662, par toute la France, voyez Correspondance administrative sous le règne de Louis 14, publiée par M. Depping,I, 654, 656, 657,658.).

 

    Une autre pièce du même recueil, à la date du 8 mai 1664, nous montre, deux années plus tard, la même misère affreuse sévissant encore dans la Beauce et dans le Poitou.

 

Le roi, pendant ce temps, heureux aux pieds de La Vallière, prodiguait l'argent de la France en fêtes galantes, et commençait le long scandale de ses amours adultères. La France, toujours si riche pour payer la vaine et stérile gloire des armes, vit encore augmenter toutes ses charges en 1674.

 

     Voici ce qu'écrivait à Colbert, à la date du 29 mai 1675, le duc de Lesdiguières, gouverneur du Dauphiné « Monsieur, je ne puis différer de vous faire savoir la misère où je vois réduite cette province; le commerce y cesse absolument, et, de toutes parts, on me vient supplier de faire connaître au Roy l'impossibilité où l'on est de payer les charges. Il est assuré, monsieur, et je vous parle pour en être bien informé, que la plus grande partie des habitants de la dite province n'ont vécu pendant l'hiver que de pain de glands et de racines, et que présentement, on les voit manger l'herbe des prés et l'écorce des arbres. Je me sens obligé de vous dire les choses comme elles sont, pour y donner après cela l'ordre qu'il plaira à Sa Majesté. »

 

 

 

"Lu, DIGERE et mis en page par PATRICK GARCIA"

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Les contes servent aussi à l'éducation des petits, mais souvent des grands. (Repro: Patrick Garcia)

 

UN JOLI CONTE AGENAIS 

"Les deux Filles"

 

II y avait une fois un homme et une femme qui avaient une fille jolie comme le jour. La femme mourut, et l'homme se remaria avec une femme qui accoucha d'une autre fille laide comme le péché.

Quand les deux filles furent grandelettes, la marâtre, qui ne pouvait pas sentir la jolie fille et qui la rossait vingt fois par jour, dit a son homme :

— Prends ta fille et va la faire perdre.

L'homme avait pitié de la jolie fille; mais il avait peur de sa femme, et il répondit :

 — Je ferai ce que tu veux.

Mais la jolie fille, qui était cachée derrière la porte, avait tout entendu, et aussitôt elle courut le dire à sa marraine.

— Filleule, dit la marraine, remplis tes poches de cendres que tu sèmeras sur ton chemin. Par ce moyen tu rentreras à la maison.

La jolie fille revint au galop chez son père, et remplit ses poches de cendres. A peine avait-elle fini, que son père lui dit :

— Allons chercher des champignons dans le bois.

Ils partirent pour le bois; mais le père n'avait pas le cœur

à chercher des champignons. Tout en marchant, la jolie fille semait sur son chemin les cendres qu'elle avait dans ses poches, comme sa marraine le lui avait dit. Enfin, le père se jeta dans un fourré sans être vu, laissa la jolie fille seulette, et revint dans sa maison à l'entrée de la nuit.

— Eh bien! Mon homme, as-tu fait perdre ta fille ?

— C'est fait.

— Eh bien ! Mon homme, pour ta peine lu vas manger avec nous une assiette de cruchade (Bouillie épaisse faite avec de la farine de mais.).

Tout en mangeant la cruchade, l’homme pensait à la jolie

fille qu'il avait abandonné toute seulette dans le bois, et disait:

— Ah! Si la pauvrette était ici, elle mangerait aussi sa portion de cruchade.

— Je suis ici, père, dit la jeune fille qui avait retrouvé son chemin au moyen des cendres, et qui écoutait à la porte.

Le père fut bien content de voir la jolie fille revenue et mangeant sa portion de cruchade de bon appétit. Mais quand elle fut allée se coucher avec sa sœur, la marâtre lui dit:

— Tu es une bête, tu n'as pas conduit ta fille assez loin. Ramène-la demain dans le bois, et tache qu'elle ne revienne pas. L'homme avait pitié de la jolie fille; mais il avait peur de sa femme, et il dit:

— Je ferai ce que tu veux.

Mais la jolie fille qui s'était levée de son lit et qui écoutait, cachée derrière la porte, avait tout entendu. Aussitôt elle courut le dire a sa marraine.

— Filleule, dit la marraine, remplis tes poches de graines de lin que tu sèmeras sur ton chemin. Par ce moyen tu rentreras à la maison.

La jolie fille revint au galop chez son père, remplit ses poches de graines de lin et se remit au lit. Le lendemain matin, son père entra dans sa chambre et lui dit:

— Allons chercher des champignons dans le bois. Ils partirent pour le bois ; mais le père n'avait pas le cœur à chercher des champignons. Tout en marchant, la jolie fille semait la graine de lin qu'elle avait dans ses poches, comme sa marraine le lui avait dit. Enfin, le père se jeta dans un fourré sans être vu, laissa la jolie fille seulette, et s'en revint dans sa maison à l'entrée de la nuit,

— Eh bien mon homme, as-tu fait perdre ta fille?

— C'est fait. — Et bien! Mon homme, pour ta peine tu vas manger avec nous une assiette de cruchade.

Tout en mangeant la cruchade, l'homme pensait à la jolie fille qu'il avait abandonnée toute seulette dans le bois, et disait:

— Ah ! si la pauvrette était ici, elle mangerait aussi sa portion de cruchade.

— Je suis ici, père, dit la jolie fille qui avait retrouvé son chemin au moyen de la graine de lin, et qui écoutait à la porte.

Le père fut bien content de voir la jolie fille revenue et mangeant sa portion de cruchade de bon appétit. Mais quand elle fut allée se coucher avec sa sœur, la marâtre lui dit :

— Tu es une bête, tu n'as pas conduit ta fille encore assez loin. Ramène-la demain dans le bois, et tache qu'elle ne revienne pas.

L'homme avait pitié de la jolie fille; mais il avait peur de sa femme, et il dit:

— Je ferai ce que tu veux.

Mais la jolie fille qui s'était levée de son lit et qui écoutait, cachée derrière la porte, avait tout entendu. Aussitôt elle courut le dire à sa marraine.

— Filleule, dit la marraine, remplis tes poches de grains de mil que tu sèmeras sur ton chemin. Par ce moyen tu rentreras à la maison.

La jolie fille revint au galop chez son père, remplit ses poches de grains de mil et se remit au lit. Le lendemain matin son père entra dans sa chambre et lui dit:

— Allons chercher des champignons dans le bois.

Ils partirent pour le bois; mais le père n'avait pas le cœur à chercher des champignons. Tout en marchant, la jolie fille semait les grains de mil qu'elle avait dans ses poches, comme sa marraine lui avait dit. Enfin, le père se jeta dans un fourré sans être vu, laissa la jeune fille seulette, et s'en revint dans sa maison.

Mais quand la jolie fille voulut reprendre son chemin au moyen des grains de mil, il se trouva qu'ils avaient été mangés par les pies. Elle marcha longtemps, longtemps, longtemps à travers le bois, jusqu'à un château grand comme la ville d'Agen.

— Pan ! Pan !

— Qui frappe?

— C'est une pauvre fille qui a perdu son chemin, et qui demande à souper et à loger.

La dame du château envoya la jolie fille souper à la cuisine avec ses valets et ses servantes, et commanda qu'on lui donnât un bon lit. Le lendemain matin elle la fit venir dans sa chambre, et ouvrit la porte d'un cabinet qui était tout plein de robes.

— Jolie fille, quitte les hardes, et choisis les habits que tu voudras.

La jolie fille choisit la robe la plus laide. Alors la dame du château la força de prendre la plus belle, et de la mettre sur- le-champ. Ensuite elle ouvrit un grand coffre plein de pièces et de bijouterie.

— Jolie fille, prends dans ce coffre tout ce que tu voudras.

La jolie fille ne prit que deux liards et une bague de cuivre.

Alors la dame du château la chargea de quadruples, de bagues, de chaines et de pendeloques d'or, et la mena à l’écurie.

— Jolie fille, prends la bête que tu voudras, avec la bride et la selle.

Mais la jolie fille ne prit qu'un âne, un licou de corde et une mauvaise couverture. Alors la dame du château la força de prendre le plus beau cheval, la plus belle bride et la plus belle selle.

Maintenant, lui dit-elle, monte à cheval et reviens dans ton pays. Ne te retourne point du côté du château que tu ne sois là-bas, au sommet de cette côte. Alors, lève la tête et attends.

La jolie fille remercia bien la dame du château, monta à cheval, et partit pour son pays, sans jamais se retourner. Quand elle fut au sommet de la côte, elle leva la tête et attendit. Alors trois étoiles descendirent du ciel : deux se reposèrent sur sa tête, et une sur son menton.

Comme elle se remettait en route, un jeune homme s'en revenait de la chasse, monté sur son grand cheval, avec neuf chiens lévriers à sa suite : trois noirs comme des charbons, trois rouges comme le feu, et trois blancs comme la plus fine toile. Quand il vit une si belle cavalière, il mit son chapeau à la main.

— Demoiselle, dit-il, je suis le fils du roi d'Angleterre. J'ai roulé le monde pendant sept ans, et je n'ai trouvé aucun homme aussi fort et aussi hardi que moi. Si vous le voulez, je serai votre compagnon, pour vous défendre contre les méchantes gens.

— Merci, fils du roi d'Angleterre; je saurai bien retrouver seulette le chemin de mon pays. Mais je n'ose pas retourner à la maison par crainte de ma marâtre, qui ne peut me voir à cause de sa fille, laide comme le péché. Par trois fois elle a forcé mon père d'aller me perdre dans un bois.

    Alors le fils du roi d'Angleterre entra dans une colère terrible. Il tira son épée et siffla ses chiens lévriers :

— Jolie fille, montre-moi le chemin de ta maison. Je veux aller faire manger par ma meute ton père, ta marâtre et ta sœur.

— Fils du roi d’Angleterre, votre meute est à votre commandement; mais vous ne ferez pas cela. S'il plait à Dieu, il ne sera pas dit que mon père, ma marâtre et ma sœur auront souffert le moindre mal à cause de moi.

Mais le fils du roi d'Angleterre ne voulait rien entendre, et criait comme un aigle :

— Eh bien, je dirai à mon juge rouge : « Juge-les tous les trois à mort. » Je le paie : il faut qu'il gagne son argent.

— Fils du roi d'Angleterre, votre juge rouge est à votre commandement; mais vous ne ferez pas cela. S'il plait à Dieu, il ne sera pas dit que mon père, ma marâtre et ma sœur auront souffert le moindre mal à cause de moi,

— Eh bien, si vous voulez que je leur pardonne, il faut que vous soyez ma femme.

— Fils du roi d'Angleterre, je serai votre femme si vous voulez leur pardonner.

Le fils du roi d'Angleterre épousa la jolie fille, qui fut bien heureuse avec lui et devint la plus grande dame du pays. Peu de temps après la noce, la sœur, laide comme le péché, apprit ce qui s'était passé et dit:

— J'irai au bois, moi aussi, et il m'en arrivera autant.

Elle partit pour le bois et marcha longtemps, longtemps, longtemps. Enfin, elle arriva à la porte du château grand comme la ville d'Agen. — Pan ! Pan !

— Qui frappe!

— C'est une pauvre fille qui a perdu son chemin, et qui demande à souper et à loger.

La dame du château envoya la fille laide comme le péché souper à la cuisine, avec ses valets el ses servantes, el commanda qu'on lui donnât un bon lit. Le lendemain, elle la fit venir dans sa chambre, elle ouvrit la porte du cabinet qui était tout plein de robes.

— Mie, quittes les hardes, et choisis les habits que tu voudras.

La fille laide comme le péché choisit la plus jolie robe. Alors la dame du château la força de prendre la plus laide, et de la mettre sur-le- champ. Ensuite elle ouvrit le coffre plein de pièces et de bijouterie.

— Mie, prends dans ce coffre ce que tu voudras.

La fille laide comme le péché choisit des quadruples, des bagues, des chaines et des pendeloques d'or; mais la dame du château ne lui laissa prendre que deux liards et une bague en cuivre. Cela fait, elle la mena à l’écurie.

— Mie, choisis la bête que tu voudras, avec la bride et la selle.

La fille laide comme le péché choisit le plus beau cheval, la plus belle bride et la plus belle selle ; mais la dame du château ne lui laissa prendre qu'un âne, un licou de corde et une mauvaise couverture.

— Maintenant, lui dit-elle, monte sur ton âne, et reviens dans ton pays. Ne te retourne pas que tu ne sois là-bas au sommet de cette côte. Alors, lève la tête et attends.

La fille laide comme le péché ne remercia pas la dame du château. Elle monta sur son âne et repartit pour son pays; mais elle se retourna avant d'arriver au sommet de la côte et attendit. Alors trois bouses de vache tombèrent sur elle, deux sur la tête, et une sur le menton.

Comme elle se remettait en route, elle rencontra un vieil homme, sale comme un peigne et ivrogne comme une barrique.

— Mie, dit-il, je te trouve faite à ma fantaisie. II faut que tu sois ma femme, ou tu ne mourras que de mes mains.

      Par force la fille laide comme le péché dut suivre l'ivrogne dans sa maison et consentir au mariage. Depuis lors, son mari continue de boire comme un trou, et rosse sa femme vingt fois par jour.

Et cric, cric,

Mon comte est fini;

Et cric, crac,

Mon conte est achevé.

Je passe par mon pré,

Avec une cuillerée de fèves qu'on m'a donnée.

 

image_5 (2)

"Jouer à se faire peur" sers aussi à se faire du bien... (Repro: Patrick Garcia)

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D’après

« CONTES POPULAIRES RECUEILLIS EN AGENAIS »

PAR

M. JEAN FRANÇOIS BLADÉ

PARIS LIBRAIRIE JOSEPH BAER

2 RUE DU QUATRE-SEPTEMBRE,

1874.

 

 

PATRICK GARCIA VOUS DIT A BIENTÔT!!!!!

 

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  • Blog de PATRICK GARCIA pour les amoureux de notre belle région : la GUYENNE, nommée quelques fois, MOYENNE GARONNE en particulier, mais aussi le récit de mes balades en France dans des lieux typiques et historiques. Me joindre? autostar47@outlook.fr
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