PAGE 146: AQUITAINE : LE BEAU ET ROMANTIQUE CHÂTEAU DE LANQUAIS, « LOUVRE INACHEVÉ DU PÉRIGORD » (24)
« Le Louvre inachevé du Périgord »
De Bayac à Lanquais (24): La grange du château de Lanquais. (Photo: Patrick Garcia)
Gravie la butte qui porte le castel, un panneau m’apporte une déception. Le château de Lanquais se visite, mais à partir d’Avril, décidément, je n’ai pas de chance avec mes châteaux ! Bayac, Bannes, non ouverts à la visite, et Lanquais, il me faudra revenir à partir d’avril…. Pfeeee.
De Bayac à Lanquais (24): Lanquais, les deux facettes du château: à gauche moyen-âge et à droite, renaissance. (Photo: Patrick Garcia)
Curieux mélange, cette citadelle dont une moitié est à toit en poivrière et l’autre en « caissons quadrangulaires » à décorations géométriques à damiers du plus grand style 17éme siècle ! Je décide de faire le tour histoire de mieux cerner la bâtisse et peut-être de trouver un bel angle pour faire une belle photo non à contrejour… En effet, à l’opposé, au travers d’une grille monumentale, qui est l’entrée des visiteurs, je peux faire un beau cliché de la cour d’honneur. A droite, une tour hexagonale est adossée à la grosse tour ronde en toit en poivrière, mais les corps de logis qui y sont adossés sont renaissance et classique. Malgré tout, un charme se dégage de cet ensemble disparate, mais rien à voir avec le sublime « Bannes ». Je continue à en faire le tour, je passe dans une petite jungle qui masque le côté tourné vers la route, donc à la vue du grand public, dommage, ce château « ne sait pas se vendre ». Il n’est pas à ce point « envoûtant » pour se permettre de se cacher comme une perle dans son écrin… Je retourne, les écuries ou granges, immenses et remises en état, sont du plus bel effet, il parait qu’on y organise des festivités, on doit pouvoir y entasser plusieurs centaines de convives !!! (Description de la visite du château, ci-après)
LANQUAIS (Le village) ET SES VIEILLES MAISONS
Avant de repartir par le même chemin, je décide de visiter un peu le vieux village dont je devine les belles maisons. J’oblique à droite, l’église n’est pas exceptionnelle, même si elle comporte des parties romanes.
De Bayac à Lanquais (24): La place centrale de Lanquais et son église. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Belle croix près de l'église.(Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Reliques de St Eutrope. (Photo: Patrick Garcia)
Elle possède un reliquaire de St Eutrope qui « apporte la guérison aux rhumatisants ». Une croix en fer forgé est accolée à l’entrée de l’église, elle porte la date de 1855. Mais en remontant le village, quelques belles demeures s’offrent à ma vue admirative.
De Bayac à Lanquais (24): De très belles maisons à Lanquais. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Notez les belles toitures! (Photo: Patrick Garcia)
Ici, c’est le règne de la pierre calcaire jaune, du colombage, des fenêtres à meneaux, des portes cochères, des mansardes et des toits en « galettes »… Tourelles, portes gothiques, échauguettes, le bourg a connu une période florissante pour posséder de tels joyaux. A la sortie du bourg, sur une éminence, une chartreuse, ou un domaine noble, « Le Rosset », domine de sa masse pataude, la petite paroisse.
De Bayac à Lanquais (24): Le beau manoir du"Rosset". (Photo: Patrick Garcia)
Face à lui, un petit chemin mène à un petit château, sorte de manoir ayant perdu ses murailles : « La Roque ». Son plan est simple, deux corps de logis en équerre avec une tour hexagonale dans l’angle, où siège l’escalier qui dessert les étages. L’ensemble est sympa et permet de faire de belles photos depuis la route.
De Bayac à Lanquais (24): Le joli castel de "La Roque" à Lanquais. (Photo: Patrick Garcia)
Je retourne sur mes pas, remonte le village. Face à l’église, je grimpe à gauche dans le bourg, je suis une route qui s’évade vers les collines boisées en longeant des bâtisses superbes. De là, j’ai enfin, une vision du château de Lanquais émergeant des bois qui l’emprisonnent, du moins, les parties hautes….
De Bayac à Lanquais (24): Vue générale du château de Lanquais, depuis le haut du village. (Photo: Patrick Garcia)
Il faut reprendre le chemin du retour…
Je regagne le sentier qui longe le castel mais je repars à Bayac par la même sente où je suis arrivée : « Bourzac », le « Colombier » et j’arrive à mon véhicule après un joli circuit.
La promenade est moins forestière que la « Boucle du Rocher du Corbeau » par « La Vergne » et le château de Bannes, mais elle est aussi moins pénible… Il faut compter 1h20 aller, pareil pour le retour, 1h30 pour visiter le village et les alentours.
En partant à 8h, on est de retour pour midi.
VISITE DU « PETIT LOUVRE DU PERIGORD »
De Bayac à Lanquais (24): Lanquais, vu depuis la cour intérieure. (Photo: Patrick Garcia)
Depuis des mois je voulais visiter ce beau castel surnommé « Le Louvre inachevé de la Dordogne ». Un château partagé en deux corps de logis totalement différents. Une moitié moyenâgeuse, une moitié renaissance et même presque classique.
Situé sur un piton entouré de forêts, dominant le petit bourg de Lanquais, ce château est une transition très visible entre deux époques, le Moyen-âge et la Renaissance. Assez imposant, il témoigne de la puissance royale (et catholique) dans une région acquise aux réformés. La comparaison entre les deux parties est tout à fait frappante ! Un côté est dominé par l’énorme tour ronde de flanquement, destinée à battre les flancs du castel d’éventuelles agressions. En débord, elle offrait la possibilité de prendre en enfilade tout assaillant sur deux côtés. Ce côté est archétype de la défense à cette époque où le combat est souvent d’homme à homme, on escalade les murs avec des échelles, on s’invective, se provoque par bravade, on se tire dessus avec des armes de traits, arcs, puis arbalètes et pour finir, par des mousquets….
De Bayac à Lanquais (24): A gauche, les puissantes tours médiévales... (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): La belle partie médiévale. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Prenez le temps de faire le tour du"Louvre du Périgord". (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Très belle perspective pour un peintre! (Photo: Patrick Garcia)
Ces différents types d’armes ont engendrés des caractéristiques militaires reconnaissables par leur ancienneté, et aussi par leur fonction. Les meurtrières sont parfois droites et verticales, les plus anciennes, pour l’arc, puis en croix permettant de balayer horizontalement, pour finir « pâtées », c'est-à-dire évasées en s’élargissant aux extrémités pour offrir un meilleur angle de tir. Les évasements intérieurs se sont élargis avec l’arrivée des arbalètes qui demandent plus de volume pour s’orienter, en rapport à un arc qui est vertical. Puis avec l’avènement des armes à poudre, on distingue à Lanquais, des orifices pour permettre de passer le canon d’un mousquet, puis des sortes de « meurtrières » horizontales pour couleuvrines et autres bouches à feu. Ces dernières, si elles n’étaient pas précises, au début, du fait de leur canon évasé, qui expédie en quantité des projectiles peu calibrés, deviennent mortelles dans un rayon de 50 mètres, même avec des armures…
De Bayac à Lanquais (24): Les magnifiques couleurs de la pierre de Lanquais. (Photo: Patrick Garcia)
Lanquais permet de passer en revue toutes ces sortes de défenses, dans sa partie ancienne. Les tours sont couronnées de chemins de ronde où les sentinelles peuvent observer de loin, grâce aux créneaux, qui est le vide entre deux merlons. Aux pieds de ces sentinelles, et des créneaux, un vide, le mâchicoulis, permet de jeter des pierres où de l’eau bouillante sur un agresseur qui essayerai d’escalader les murs. La hauteur de ces défenses varie de 18 à 25 mètres. Une précision, ces belles fenêtres qui ajourent les tours médiévales, n’’étaient pas de mise, bien sûr, les salles intérieures n’étaient éclairées que par le filet de jour des meurtrières, autant dire le confort, l’humidité et la température qui devaient régner dans ces forteresses !
L’autre côté est totalement différent, pour certains, plus beau, plus moderne…. D’où son nom de « Louvre inachevé du Périgord »…. Elevé de 1565 à 1570, l’aile et le pavillon sont la copie des plans du Louvre dessinés par Philibert de l’Orme et Pierre Lescot. De grandes façades à motifs géométriques…. Les façades extérieures sont d’une uniformité et d’une tristesse…. Heureusement, ces façades donnant sur l’intérieur sont plus « accueillantes », plus chaudes, et les mansardes qui garnissent tous les toits de ce côté renaissance, sont munies d’une jolie décoration qui amoindrit l’effet de monotonie que m’inspire ce type d’architecture, imposante, mais à mon goût sans âme. On voit d’ailleurs qu’une aile était destinée à poursuivre le corps de logis en retour d’équerre. Les murs sont encore munis de chainages de pierres en attente.
De Bayac à Lanquais (24): Dans la partie renaissance, le décors est très riche. (Photo: Patrick Garcia)
Je dois dire, que je suis ressorti déçu de cette visite. La partie qui m’intéressait le plus, la plus ancienne, la partie militaire, n’est pas ouverte à la visite… Seules les parties renaissances sont visitables. Si j’avais su que je serai privé de la partie qui m’accrochait avec tant d’intérêt, je pense que je ne l’aurais pas visité, mais ce sont mes goûts personnels qui parlent ici, et ma déception. Pour être équitable, je dois dire que la partie renaissance est charmante.
Il y a plusieurs chambres toutes meublées avec goût et en meubles et tapisseries d’époque.
La « CHAMBRE DE MADAME :
De Bayac à Lanquais (24): La chambre de Madame et ses meubles précieux. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Superbe. (Photo: Patrick Garcia)
Décorée de rose. Sur la cheminée renaissance, cornes d’abondance, couronne de fleurs, feuillages, fruits symbolisent richesse et fertilité. Le mobilier d’époque caractérise l’ameublement de la fin du 16ème siècle : lit à baldaquin, table de 1580 a plusieurs usages, selon les moments de la journée, elle sert à l’écriture, à la prière ou à la toilette… La grande armoire à linge (de 1620) possède des panneaux à facettes en pointes de diamant, pour jouer avec la lumière. Les deux cabinets, en face à face (1580) servaient au rangement des biens précieux, dont les actes et documents. Leur déco est inspirée par les formes architecturales du château. A noter une baignoire ! Elle est mobile avec ses poignées. L’eau y était versée tiède sur un drap pour rendre le bain plus confortable. Les parquets cloutés et non chevillés, datent du 18ème siècle, le plafond aux poutres moulurées est à la française.
L’APPARTEMENT DE MONSIEUR
De Bayac à Lanquais (24): Dans les appartements de Mr, je vous présente la chambre.(Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): L'entrée du secrétariat. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Le secrétariat. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Son séjour près d'une monumentale cheminée, ci-dessous. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): On reste pantois devant un tel travail, un tel luxe. (Photo: Patrick Garcia)
Au 17ème siècle, l’appartement est composé de 3 espaces (nous apprends-t-on sur les panneaux) : l’antichambre, la chambre et le cabinet. C’est une partie privative dans une habitation commune. Chaque courtisan ou membre de la famille jouit, ainsi, d’un appartement. Le château s’apparente à un grand immeuble à usage d’habitation.
L’ameublement date de l’époque Louis 13 et Louis 14, lit a baldaquin, table pour les repas que l’on prenait dans ses appartements, bureau Mazarin, chauffe-pieds et fauteuils.
La cheminée est un exceptionnel modèle d’architecture datant de 1601. Elle est ornée de motifs naturalistes. En partie haute, les cartouches rayonnants brillent comme des astres autour des armoiries du propriétaire qui auraient été détruites à la révolution. Malgré tout, cette cheminée est superbe, même si la profusion des détails sur la pierre ivoire, donne un effet rococo non déplaisant. Les pieds droits et le fronton de la porte est aussi lourdement chargé, comme si le sculpteur avait voulu montrer son savoir faire… Dans le cabinet un très beau bureau relevé de décors en laiton. L’ensemble des pièces est décoré de tableaux de cavaliers ou des propriétaires défunts…
LA SALLE A MANGER :
De Bayac à Lanquais (24): Un menu de 1751! De quoi s'empiffrer.... (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Les convives dos à la cheminée, pour leur confort. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Meuble précieux. (Photo: Patrick Garcia)
Le concept de salle à manger apparaît en France en 1620. La table, à l’origine, dressée sur des tréteaux, ne deviendra meuble qu’au 18ème siècle. Les nappes aux plis très accentués, sont très longues, elles touchent presque le sol. Le pliage des serviettes prend la forme de fleurs ou de nefs. La table est décorée de fruits ou de fleurs. Alexis de Gourgue, au 19ème siècle, créera cette salle à manger et commandera le mobilier de style renaissance : table en noyer pour 28 personnes, chaises, buffets, dont l’un est au décor de St Front chassant le dragon de la Dordogne. Grande armoire du 17ème siècle. La cheminée est décorée d’une « tempera », peinture à l’œuf. Remarquez les plafonds peints et les murs tendus de tapisseries imprimées au lys de France et aux hermines de Bretagne, évocation symbolique du mariage de Charles 8 et d’Anne de Bretagne.
Le « SERVICE A LA FRANCAISE AU 18ème SIECLE » :
Les repas, à cette époque, étaient ordonnancés selon un service appelé « à la française ». Le repas était divisé en 5 ou 8 services : potages, des tourtes, des viandes, des volailles, des poissons et des entremets. Chaque service comprenait 3 ou 4 plats pour offrir un meilleur choix aux invités. Ces plats sont proposés dans de petits contenants disposés sur la table de façon symétrique et répétitive. Devant un tel choix, chaque convive se sert lui-même, facilement en tendant le bras. A chaque service, les plats sont relevés toutes les 15 minutes. Les convives sont dos à la cheminée et sans vis-à-vis. Les couverts sont du même côté et les plats sont disposés devant chacune des assiettes. Le couteau et la fourchette sont à droite de l’assiette, la cuillère est devant. Les pains sont des miches individuelles, placées à gauche de l’assiette. Les seules pièces de services sont des salières et des longues cuillères à ragoût, les oilles. Les verres sont placés sur une desserte à vin à proximité. Le service du vin était assuré par un serviteur, qui sur demande présentait sur un plateau, un verre à boire.
Une fois vidé, le verre retournait sur la table à vin, était rincé sous la fontaine, puis placé sous un rafraîchissoir. Ce service a perduré jusqu’en 1810, date où Napoléon 1er le remplace par le « service à la Russe », service que nous utilisons encore aujourd’hui. »
LES CAVES
Je poursuis la visite par les caves, car un habitant m’a parlé « des oubliettes et cachots », et je suis sûr que mon petit fils qui étudie en ce moment le monde des châteaux et du moyen-âge va apprécier.
De Bayac à Lanquais (24): Vous défonceriez cette porte à coups d'épaules, vous? (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Ces clous permettent le renfort des portes contre l'emploi de masses d'armes. (Photo: Patrick Garcia)
Je pousse une énorme porte garnie de longs clous acérés et semblables à des pointes de carreaux d’arbalète. Il y en a à foison… Avec cette garniture, pas question d’essayer de la forcer à coups d’épaule !
Nous descendons dans les entrailles de la citadelle. Ces sous-sols renferment deux prisons. Les caves et prisons datent de la construction du château médiéval, c'est-à-dire du 13 /14ème siècle. A cette époque, Lanquais est une seigneurie où le propriétaire avait le droit de justice sur ses terres, d’où la présence de cachots.
De Bayac à Lanquais (24): Graffitis des prisonniers. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): impressionnant pour les jeunes enfants, ce mannequin simulant un malheureux prisonnier. (Photo: Patrick Garcia)
Nous entrons dans un univers sombre et impressionnant. Derrière une grille, un cachot où un mannequin, assis, fers aux pieds, attend son supplice ou la mort. Cette reconstitution marque les enfants, dont le mien qui ne peut détacher les yeux de la figure du mannequin. Les caves voûtées en berceau sont impressionnantes, ici à l’abri des tentations, s’entassaient victuailles et vins fins qui régaleraient la petite cour des courtisans. Sur un côté, s’échappent dans le sol des « cluzeaux » ou souterrains refuges…
De Bayac à Lanquais (24): Les caves et réserves du château. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Les souterrains permettant la fuite éventuelle... (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Geôles, souterrains, grilles... Un univers inquiettant. (Photo: Patrick Garcia)
Nous remontons dans le monde des vivants, quittant les lumières artificielles des soubassements du castel, pour des salles lumineuses, dont la première qui s’offre à moi est la :
« SALLE D’ ARMES ».
De Bayac à Lanquais (24): La salle d'armes de la garnison. Les assauts se déroulaient au centre du dallage blanc. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Parmi les panoplies. (Photo: Patrick Garcia)
Cette pièce est une authentique salle d’armes. Elle servait d’une part à la défense du château, on pouvait tirer, soit au petit canon, par des bouches à feu, soit au mousquet depuis l’embrasure des fenêtres, spécialement conçues pour qu’un homme y tienne debout, couché ou assis.
Cette salle servait aussi de lieu pour apprendre le maniement de l’épée. Le sol en larges carreaux de terre non vernissé, détermine la zone d’entrainement. Les tomettes rectangulaires, permettent de visualiser la position des pieds pour exécuter tel ou tel mouvement.
La décoration est sobre, la cheminée est uniquement moulurée. Au mur, quelques armes exposées, permettent de se resituer dans l’ambiance de la pièce qui devait résonner des cris d’encouragements et des cliquetis métalliques.
Enfin, j’arrive dans un secteur qui, pour ceux qui me connaissent me passionne :
« LA CUISINE MEDIEVALE » :
De Bayac à Lanquais (24): Voila où au moyen-âge, on préparait les repas. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Une belle batterie de cuisine... (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Evier et citerne avec son robinet. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Dans cette cheminée, que de mets ont été concoctés....(Photo: Patrick Garcia)
Elle se situe sous la partie médiévale du 12ème siècle. Le sol est en large dalles de pierre, une conception plus ancienne que le sol en pisé de la renaissance. Par une trappe, les cuisiniers accédaient aux caves où étaient conservés les céréales, les vins et les fruits.
LA CUISINE RENAISSANCE :
De Bayac à Lanquais (24):Un sol luisant par son usure. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): (Photo: Patrick Garcia)
Sa décoration, comme celle des autres pièces, a été faite à partir de documents anciens. A gauche, le bûcher où est entreposé le bois sec, un billot pour couper le bois du petit four, la grande cheminée où l’on faisait cuire les repas. Sur la table, le mortier servait à écraser les épices. Sur le mur, une batterie de cuisine en cuivre, comprenant cul de poule rond pour la préparation des œufs, chaudrons, casserole à sauce, daubière, tourtière. Les verjus étaient conservés dans les dames-jeannes, l’eau, dans la citerne encore existante dans le mur. Cette citerne était alimentée par les toits ou le puits en fonction de la saison. La vaisselle était faite dans la grosse bassine en cuivre et égouttée dans l’égouttoir en bois, sous la fenêtre. Le sol est en pisé, mosaïque rustique à l’italienne, faite par la juxtaposition de pierres pointues, polies sur le dessus, et fichées dans la terre brute.
En ce qui concerne la préparation des plats, les condiments ou aromates, comme le gingembre, le safran, la cannelle, le girofle, la marjolaine, les graines de Paradis (poivre) et l’hysope, sont utilisés pour relever les plats et parfumer les vins. Les bouillons de volaille ou de viande et les sauces sont liées à la mie de pain. Les viandes sont cuites au four, bouillies ou rôties. L’acidité est obtenue à partir de vinaigre ou de jus de raisin vert : le verjus. Le citron n’est accommodé en cuisine qu’à partir du 16ème siècle. Un texte précise qu’à Lanquais, en 1580, il y a 6 servantes, 2 cuisiniers et 15 hommes d’armes. Ce qui semble peu, pour arriver à servir cette petite cour en Périgord, quant aux 15 hommes d’armes, c’est à peu près le nombre courant dans ce type de château.
Après les sous-sols, je remonte dans une autre portion de Lanquais et j’abouti au :
« SALON DE MUSIQUE » :
De Bayac à Lanquais (24): Billard, tables de jeux, tableaux de famille.... la salle de loisirs. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Salle de jeux, mais aussi de musique. (Photo: Patrick Garcia)
D’après les notices, cette pièce conviviale où on se réunissait en famille, a été créée par la division du grand salon. Chaque meuble a sa propre utilité : table de jeux de cartes, table à jeu d’échec, guéridon pour le service des collations, piano du 19ème siècle, billard Charles 10. Les tableaux représentent des membres de la famille de Gourgue, magistrats bordelais, propriétaires de Lanquais depuis 1732.
Au 18ème siècle, on se prononce pour des pièces plus petites. La vie ne reste plus uniquement confinée dans l’appartement. Les architectes créent de nouveaux espaces, dont divers petits salons de philosophie, de musique ou de lecture. Cette pièce, richement décorée et meublée, est un peu l’âme du château renaissance. On sent qu’ici, les maîtres laissaient leurs petits soucis de propriétaires fonciers au vestiaire pour se délasser devant une bonne partie d’échecs ou de cartes. Parfois, sous les ors des ancêtres, une cantatrice ou un ténor est venu pousser la chansonnette pour le plus grand bonheur des propriétaires.
« LE GRAND SALON BLEU » :
De Bayac à Lanquais (24): Un meuble précieux avec de multiples tiroirs secrets. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): le magnifique salon bleu. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Le salon bleu, vue générale. (Photo: Patrick Garcia)
Déjà au moyen âge, l’habitat seigneurial est divisé en deux espaces principaux : « la camera » ou chambre privative et la salle aulique ou aula, pour les réceptions. Cette salle d’apparat est conservée bien au-delà de la Renaissance. Le choix du mobilier, la grandeur des tableaux et la magnificence de la cheminée sont les témoins du prestige des propriétaires.
La cheminée portique est l’une des plus exceptionnelles de la renaissance. Elle est commandée en 1601 par Henri de la Tour d’Auvergne, pour sa femme, Isabelle de Nassau. La perfection du rythme est donnée par le respect du nombre d’or. Elle est de style dorique. Au 19ème siècle, la mode est aux cheminées plus petites, celle de Lanquais sera réduite avec des carreaux de faïence décorés du « Lion d’Or sur champ d’Azur », armoiries de la famille de Gourgue. La table de milieu est un meuble d’apparat en bois doré de l’époque louis 14 (vers 1700).
Le salon est composé de 4 fauteuils cabriolets en bois naturel, dit à « la capucine » (vers 1740). Le cabinet à 2 vantaux (vers 1650), face à la cheminée, est en bois de placage de noyer. Il s’ouvre sur un théâtre à l’italienne en marqueterie, avec au centre, un jeu de glace et des tiroirs secrets. La glace montée sur bois doré (vers 1720) est composée d’un miroir central à entourages. Les verriers du 18ème siècle ne savaient pas étirer les glaces sur de grandes surfaces, ils imaginent de les juxtaposer pour agrandir la surface de la réflexion de la lumière. Le lustre en bronze doré est à 21 lumières et pendu de pampilles en cristal de roche qui reflétaient la lumière. Ce salon est la partie la plus noble du château renaissance, tout y est étudié au millimètre, et les différents tons de bleu utilisés pour le décorer, sont merveilleusement rehaussés par la nappe jaune et bleu rehaussé d’un liseré d’or, mais aussi par les boiseries fines et les tableaux qui ajoutent à la noblesse de la pièce. A noter, comme ailleurs, la richesse des parquets sur lesquels on pourrait faire des concours de glissades.
De Bayac à Lanquais (24): les gerbes magnifiques du grand escalier. (Photo: Patrick Garcia)
De Bayac à Lanquais (24): Wahhhhhh! (Photo: Patrick Garcia)
Après ces beaux appartements, la visite se termine par la montée d’un escalier qui devait desservir la partie interdite à la visite, ou partie médiévale. Mais là, toutes les portes sont fermées et cette partie est interdite à la visite. Il en reste le beau témoignage de l’art de construire les escaliers à la renaissance. Selon une notice à la disposition des visiteurs, et Lanquais n’en est pas avare, au moyen âge, on parle de « degrés » ou de « vis ». Le terme « escalier » apparaît » en 1545 » à la renaissance. Celui de Lanquais est un escalier à la « romaine ». Ce modèle est d’origine italienne. Il est techniquement appelé escalier « rampe sur rampe ». Il est construit à l’intérieur du bâtiment, à la différence de la vis qui est souvent dans une tour construite en toute ou partie à l’extérieur. La libération des ouvertures marque la fin des châteaux forts. La renaissance fait entrer la lumière dans les pièces par les fenêtres. La forme de la croisée en bois reste proche de celle des meneaux du début du 16ème siècle. Malgré le goût nouveau pour l’esthétique italienne, les architectes de Lanquais arment le château de fenêtres de tir. Un garde peut s’y tenir debout. Ces fenêtres défensives serviront lors du siège de 1577.
Je gravis jusqu’en haut ce bel escalier qui me permet de faire quelques beaux clichés de la voûte en gerbe et croisées d’ogives. De quoi s’émerveiller une fois de plus de l’habileté des architectes et des tailleurs de pierres de l’époque… Ils savaient faire du « lourd » et du costaud en se ménageant des espaces de légèreté gracile afin de démontrer leur talent.
De Bayac à Lanquais (24): A noter que sous le château, une base de loisirs s'est ouverte...(Photo: Patrick Garcia)
Voila, la visite proprement dite est terminée, je fais le tour du château, des arbres magnifiques, un parc romantique, et plus bas, l’immense grange-écurie où étaient parqués les chevaux. Réhabilité, ce superbe bâtiment est à présent une salle de fête dans un cadre magnifique. A noter, comme je le propose dans ma randonnée à Lanquais, la visite du village de Lanquais, qui vaut le détour par ses vieilles maisons et son architecture !
Bonne visite!
PATRICK GARCIA
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